Pages

jeudi 11 janvier 2018

La République en marche et la démocratie chrétienne


J’ai entrepris de lire la démocratie religieuse de Maurras, toujours attiré par les esprits corrosifs qui pensent à la pointe de l’épée et savent trancher,contrairement à moi.

 

Marc Sangnier définissait la démocratie chrétienne comme une « action populaire bienfaisante » qui doit être « dégagée de toute signification politique », bien qu’il se propose de « Mettre en marche notre démocratie », ajoutant :  « Je dis « mettre en marche », car si l'on peut atteindre la monarchie, la démocratie apparaîtra toujours, au contraire, comme l'expression d'une orientation, le sens d'un mouvement. »

 

La démocratie chrétienne se présente donc comme un élan porté par une « infime minorité » élitaire, pour laquelle « le Christ » est « l’expression de l’intérêt général », comme « la loi est l’expression de la volonté générale » selon Rousseau. Cet élan s’inscrit dans une philosophie de l’histoire hégélienne, à laquelle Maurras reproche à juste titre, bien que sa propre alternative soit essentiellement guerrière, de supposer une évolution sans creux ni bosse, continue et sans accident, une évolution dont serait exclue la pensée de la mort, de la mort comme terme négatif, alors que le terme passe généralement pour un point oméga.

 

Mais René de Marans, un des correspondants de Maurras, note un trait qu’il présente comme caractéristique de Marc Sangnier : il détourne son « christianisme social » en un appel libéral au progrès individuel indifférent à « l’organisation de la société ». Accusation injuste, outrancière. Notons toutefois avec Maurras : « Dans un pareil système, il est assez naturel d'en venir, comme l'observe M. de Marans, « à souhaiter les institutions qui soutiennent le moins l'homme. Plus l'individu manquera de protection du côté de l'organisation sociale, plus il aura besoin, en effet, d'un appui interne, et cet appui est tout trouvé, c'est la foi au Christ. »

 

Je ne sais pas si cela s’applique à Marc Sangnier, mais cela décrit bien le processus appelé par La République en marche. Ce slogan d’ »en marche ! » résulte sans doute des initiales du fondateur de ce mouvement, de la connaissance qu’avait cet homme réputé cultivé du fait qu’ »en marche » est la traduction du « Heureux » des Béatitudes, et de l’affirmation silloniste que la participation à la vie politique de la démocratie chrétienne, notamment à l’origine du projet européen, relève d’un mouvement ou d’un élan qui se définit comme « en marche ».

 

Or Emmanuel Macron m’est toujours apparu, dans son incernabilité qui cultive l’ambiguïté jusqu’à la saturation, comme le méchant roi Turlubulu du conte, un Jupiter fuyant qui n’organise positivement que la dérégulation. Si René de Marans et Maurras ont raison contre Sangnier, cette fuite de ce qui soutient l’homme pour le remplacer par des structures vagues, n’est-elle pas la tactique adoptée depuis toujours par la démocratie chrétienne ? Si nous ne sommes que mobiles et soutenus par »un appui intérieur », « Pourquoi ne pas faire voter systématiquement pour Dioclétien ou pour M. Combes ? », demande Maurras, lequel n’aime le peuple que dans sa position de dominé et non comme un acteur qui mérite à la fois de décider et d’être soutenu ?

 

Au moment où j’achève de rédiger ces lignes, j’apprends que le sujet du Téléphone sonne de ce soir est : « La démocratie elle aussi est-elle en marche ? »

 

 

J’ai entrepris de lire la démocratie religieuse de Maurras, toujours attiré par les esprits corrosifs qui pensent à la pointe de l’épée et savent trancher,contrairement à moi.

 

Marc Sangnier définissait la démocratie chrétienne comme une « action populaire bienfaisante » qui doit être « dégagée de toute signification politique », bien qu’il se propose de « Mettre en marche notre démocratie », ajoutant :  « Je dis « mettre en marche », car si l'on peut atteindre la monarchie, la démocratie apparaîtra toujours, au contraire, comme l'expression d'une orientation, le sens d'un mouvement. »

 

La démocratie chrétienne se présente donc comme un élan porté par une « infime minorité » élitaire, pour laquelle « le Christ » est « l’expression de l’intérêt général », comme « la loi est l’expression de la volonté générale » selon Rousseau. Cet élan s’inscrit dans une philosophie de l’histoire hégélienne, à laquelle Maurras reproche à juste titre, bien que sa propre alternative soit essentiellement guerrière, de supposer une évolution sans creux ni bosse, continue et sans accident, une évolution dont serait exclue la pensée de la mort, de la mort comme terme négatif, alors que le terme passe généralement pour un point oméga.

 

Mais René de Marans, un des correspondants de Maurras, note un trait qu’il présente comme caractéristique de Marc Sangnier : il détourne son « christianisme social » en un appel libéral au progrès individuel indifférent à « l’organisation de la société ». Accusation injuste, outrancière. Notons toutefois avec Maurras : « Dans un pareil système, il est assez naturel d'en venir, comme l'observe M. de Marans, « à souhaiter les institutions qui soutiennent le moins l'homme. Plus l'individu manquera de protection du côté de l'organisation sociale, plus il aura besoin, en effet, d'un appui interne, et cet appui est tout trouvé, c'est la foi au Christ. »

 

Je ne sais pas si cela s’applique à Marc Sangnier, mais cela décrit bien le processus appelé par La République en marche. Ce slogan d’ »en marche ! » résulte sans doute des initiales du fondateur de ce mouvement, de la connaissance qu’avait cet homme réputé cultivé du fait qu’ »en marche » est la traduction du « Heureux » des Béatitudes, et de l’affirmation silloniste que la participation à la vie politique de la démocratie chrétienne, notamment à l’origine du projet européen, relève d’un mouvement ou d’un élan qui se définit comme « en marche ».

 

Or Emmanuel Macron m’est toujours apparu, dans son incernabilité qui cultive l’ambiguïté jusqu’à la saturation, comme le méchant roi Turlubulu du conte, un Jupiter fuyant qui n’organise positivement que la dérégulation. Si René de Marans et Maurras ont raison contre Sangnier, cette fuite de ce qui soutient l’homme pour le remplacer par des structures vagues, n’est-elle pas la tactique adoptée depuis toujours par la démocratie chrétienne ? Si nous ne sommes que mobiles et soutenus par »un appui intérieur », « Pourquoi ne pas faire voter systématiquement pour Dioclétien ou pour M. Combes ? », demande Maurras, lequel n’aime le peuple que dans sa position de dominé et non comme un acteur qui mérite à la fois de décider et d’être soutenu ?

 

Au moment où j’achève de rédiger ces lignes, j’apprends que le sujet du Téléphone sonne de ce soir est : « La démocratie elle aussi est-elle en marche ? »

 

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire